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XII
L’anneau de fer

Des portes de Sarlande à la Prairie il y a bien une bonne demi-lieue ; mais, du train dont j’allais, je dus ce jour-là faire le trajet en moins d’un quart d’heure. Je tremblais pour Roger. J’avais peur que le pauvre garçon n’eût, malgré sa promesse, tout raconté au principal pendant l’étude ; je croyais voir encore luire la crosse de son pistolet. Cette pensée lugubre me donnait des ailes.

Pourtant, de distance en distance, j’apercevais sur la neige la trace de pas nombreux allant vers la Prairie, et de songer que le maître d’armes n’était pas seul, cela me rassurait un peu.

Alors, ralentissant ma course, je pensais à Paris, à Jacques, à mon départ… Mais au bout d’un instant, mes terreurs recommençaient.

— Roger va se tuer évidemment. Que serait-il venu chercher, sans cela, dans cet endroit désert, loin de la ville ? S’il amène avec lui ses amis du