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encore : « Je connais leurs dispositions. Je sais quelle est leur influence sur un parti qu’ils ont autrefois servi, et auquel ils peuvent aujourd’hui donner une direction telle que le Gouvernement retirera plus d’avantage de leur intervention que de l’emploi d’une force militaire plus impérieusement appelée contre les ennemis du dehors. Je vous prie, Monsieur le Général, de les entendre. Ils se concerteront avec vous sur les mesures les plus propres à pacifier, dans sa naissance, une insurrection que des actes de rigueur ne feraient que rendre plus redoutable. »

En quittant Paris, les envoyés du duc d’Otrante ne se dissimulaient pas à quels soupçons allait les exposer leur démarche. Ils connaissaient l’esprit royaliste. Ils savaient à quelles défiances ils se heurteraient, quelles accusations les attendaient. Mais, forts des preuves données par eux de leur dévouement à la royauté, convaincus qu’ils accompliraient un acte patriotique, ils puisaient dans cette conviction le courage que nécessitait leur téméraire entreprise. Du reste, ils ne tardèrent pas à comprendre qu’en leur décrivant sous des couleurs lamentables l’état des pays insurgés Fouché ne les avait pas trompés. Ils s’étaient décidés à se rendre d’abord auprès du comte d’Autichamp. Tandis qu’ils cherchaient à le rejoindre, ils rencontrèrent plusieurs officiers royalistes. Tous leur tinrent le même langage, à savoir : que les moyens d’attaque et de résistance faisaient entièrement défaut.

– Nous ne concevons pas, dit l’un d’eux, ce qui a pu porter nos chefs à donner le signal de l’insurrection avant l’arrivée des alliés. Nous sommes sans argent, sans munitions, sans armes, privés de tout. Notre perte est certaine si votre mission n’aboutit pas.


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