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trouvant alors à Paris, où il venait de recevoir le grade de colonel d’infanterie, il se présenta chez le duc de Berry pour se mettre à sa disposition. Il offrait d’aller en Normandie et d’y former avec ses anciens chouans un corps de volontaires.

– Nous avons plus de forces qu’il n’en faut pour arrêter Bonaparte et les brigands qui l’accompagnent, lui répondit dédaigneusement le prince.

Quelques jours plus tard, la marche de l’impérial revenant se continuant, Moulin renouvela sa démarche auprès du duc de Berry. Cette fois, il lui fut objecté que « c’était trop tard », et que ce qu’il aurait de mieux à faire serait de se présenter au maréchal de Vioménil, qui enrégimentait à Vincennes les volontaires royaux de Paris. Le brave Moulin y courut. Il voulait « faire partie du bataillon sacré qui devait se faire tuer au pied des marches du trône ». Le maréchal le reçut parmi de nombreux officiers accourus de toutes parts, animés des mêmes héroïques intentions. Il leur donna rendez-vous à tous, pour le surlendemain, 19 mars, dans son hôtel, rue Caumartin. Lorsqu’au jour fixé ils s’y présentèrent, ce fut pour apprendre que le roi venait de quitter Paris et le maréchal de Vioménil avec lui. Le désordre, l’absence de direction furent la caractéristique de ces jours troublés et eurent pour conséquence des défections qu’avec un peu plus de sang-froid il n’eût pas été impossible de prévenir.

Suzannet, qui s’était mis en route le 6, put constater en traversant Orléans que les autorités ignoraient encore l’événement. De même à Tours. Dans cette ville, le général Dupont commandait. Suzannet alla le voir, lui fit connaître la nouvelle du retour de l’Empereur. Le général répliqua que si elle lui eût été apportée par un autre que par lui, il eût fait arrêter cet autre.