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ou à la maîtresse par l’amant ? On ne saurait répondre avec certitude. On peut, du moins, affirmer que ce projet, ils étaient également capables, l’un et l’autre, de l’avoir conçu et trop affamés de ressources pour ne pas l’exécuter sans défaillance.

La marquise de Vaubadon comptait, parmi ses amis de Paris, un puissant personnage, originaire du Calvados, où il venait souvent, l’ancien conventionnel Doulcet de Pontécoulant, membre du Sénat impérial. Elle devait à sa protection les mesures de clémence dont elle avait été l’objet après la conspiration de Georges. Si, dès cette époque, elle avait, comme on le suppose, offert ses services à Fouché, ce fut assurément par l’entremise du sénateur. Il était donc naturel qu’elle s’adressât à lui quand, résolue à livrer d’Aché, elle songeait à négocier les conditions de sa trahison pour en obtenir le plus haut prix. Peut-être objectera-t-on que le passé de Doulcet de Pontécoulant proteste contre les suppositions fâcheuses pour sa mémoire, que doit nécessairement suggérer, même à des esprits équitables et impartiaux, le rôle qu’il eut en cette affaire ? Ce passé, en effet, est celui d’un bon citoyen, courageux et loyal. Mais les pièces officielles sont là. Elles attestent qu’en cette circonstance il ne se montra pas digne de ce qu’il avait été jadis. Il n’est pas jusqu’au silence qu’en ses Mémoires il a gardé sur ces événements, qui ne le condamne. Si son rôle eût été avouable ou s’il avait pu se défendre d’avoir joué sa partie en cette ténébreuse intrigue, il s’en fût certes expliqué dans la relation qu’il nous a laissée de sa vie publique. Mais pouvait-il sans mentir ou sans s’accuser lui-même, raconter comment et pourquoi il était intervenu ? Qu’on en juge :

Soit que la marquise de Vaubadon fût allée le trouver, soit que lui-même l’eût mandée pour la mettre en