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couteau de la guillotine a mal joué pour le septième et le neuvième des individus qui ont été exécutés. Le supplice a donc été plus cruel pour ces deux malheureux. »

Le 17 février 1809, la marquise de Combray dut subir l’exposition ordonnée par l’arrêt. Les dames de Rouen avaient espéré la soustraire à cette humiliation et signé, dans ce but, une supplique à l’Empereur. Les autorités judiciaires s’étaient prononcées pour l’ajournement. Mais les ordres envoyés de Paris, en réponse à ces démarches, portaient que l’arrêt du 30 décembre devait être exécuté dans toute sa rigueur. On fit descendre Mme  de Combray chez le portier de la prison, où, lui dit-on, son fils et son médecin l’attendaient. Là, elle fut livrée à l’exécuteur qui la conduisit, escortée de gendarmes, sur la place du Vieux-Marché. Elle fut attachée à un poteau sur une estrade. Malgré la rigueur de la saison, on la laissa là, durant plusieurs heures, exposée aux regards de la foule. Mais ce supplice se transforma en une sorte d’apothéose. Personne ne voulait croire la marquise de Combray coupable. On saluait en elle une victime de l’amour maternel. La foule respecta sa personne et son malheur. Les plus grandes dames de la ville se succédaient auprès d’elle pour lui tenir compagnie. Quelques-unes avaient apporté des fleurs. Jusqu’à la fin, elles lui prodiguèrent leur assistance et leurs hommages. Grâce à ces témoignages de sympathie et de pitié, sa fermeté ne se démentit pas. Vêtue d’une robe en soie violette, un bonnet en dentelles sur ses cheveux blancs, « elle avait tout à fait l’air d’une dame de château ». En quittant le pilori, elle fut conduite dans la prison de Bicêtre, une des prisons de Rouen, où elle devait subir sa peine. En ce qui concerne sa fille, il était décidé qu’on la laisserait vivre jusqu’au terme de sa grossesse, à supposer qu’elle eût dit la vérité. Sa