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persuadés que Mme  Aquet de Férolles est embarquée en ce moment à Saint-Valery. Le préfet du Calvados ne se doute nullement de l’affaire. Il importe donc de garder le secret encore pendant huit jours. Le gendarme Chauvel doit venir lui-même à Caen avec ses deux acolytes. Le même filet les prendra. Si d’Aché n’a pas passé en Angleterre, il sera aussi de la partie. Tous les rapports de nos émissaires et les résultats de leurs conférences avec les prévenus qui ne leur déguisaient rien confirment toujours davantage que la gendarmerie, que les tribunaux du Calvados sont dévoués à la famille de Combray. Ils conviennent que le préfet et son secrétaire général leur ont fait bonne guerre. Mais ils se vantent de l’avoir constamment trompé et engagé dans de fausses routes. »


IX

Maintenant qu’on tenait Mme  Aquet de Férolles, il fallait la faire parler. Tâche difficile et délicate. Liquet s’en chargea. Il savait que la mère et la fille ne s’aimaient pas. Il avait élaboré ses plans en conséquence. « Je vais brouiller nos gens entre eux, écrivait-il encore au préfet. Un petit choc nous donnera peut-être d’utiles vérités. » Pendant deux jours il laissa la prisonnière seule, aux prises avec ses douloureuses réflexions, sans dire à personne qui elle était, feignant lui-même de ne pas la connaître. Mais le troisième jour, le 10 octobre, toujours déguisé en gendarme, il se présenta dans la cellule qu’elle occupait et l’interpella par son nom.

– Vous me connaissez ! s’écria-t-elle, épouvantée.