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par la violence qu’elle se faisait, depuis plusieurs jours, pour ne pas se trahir, lui avoua tout à coup la part qu’elle avait prise au vol. À cette révélation, la marquise éclata en reproches :

– C’est Le Chevallier qui t’a jetée dans cette aventure ! s’écria-t-elle.

– Le Chevallier l’a conseillée, répondit Mme  Aquet de Férolles, mais c’est sur les ordres du vicomte d’Aché.

– Le vicomte n’a rien ordonné de pareil, j’en suis sûre.

– Vous vous trompez, ma mère ; c’est lui qui en a eu l’idée.

Ce pénible débat se continua entre la mère et la fille jusqu’aux portes de Falaise. La marquise défendait d’Aché, Mme  Aquet de Férolles persistait à prétendre qu’on n’avait rien fait que par sa volonté. Le notaire Lefebvre, qu’elle s’empressa d’appeler, tint à Mme  de Combray le même langage. Il affirma que l’enlèvement des caisses publiques faisait partie du programme convenu entre d’Aché et Le Chevallier. La marquise, alors, déclara qu’elle en aurait le cœur net. Le même jour, elle partait pour Bayeux et y resta vingt-quatre heures. Quand elle revint, elle raconta qu’elle avait vu « un de ses plus intimes amis » et qu’il blâmait la manière dont les auteurs du coup avaient opéré. Il fut établi au procès que cet ami intime était le vicomte d’Aché. Il attendait, caché à Trévières, chez les Montfiquet, une occasion propice pour s’embarquer. Le propos tenu par lui à Mme  de Combray fut considéré comme une preuve de leur culpabilité à tous les deux. Du reste, trop compromise pour reculer, la malheureuse femme ne songea plus qu’à tirer sa fille de ce mauvais pas, ajoutant ainsi de nouvelles imprudences à toutes celles qui constituaient déjà contre elle des charges accablantes.