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que l’Angleterre était l’inspiratrice de cette création, qu’elle avait promis des secours : quinze cent mille francs par mois et un fonds permanent de 12 millions. La concentration des bandes devait se faire aux Sables-d’Olonne, sous le commandement du comte d’Artois, ayant autour de lui Dumouriez, d’Autichamp et Suzannet. Une organisation analogue existait pour la Bretagne. Mais Daniaud-Duperrat n’en connaissait ni les moyens ni les ressorts, le chevalier de Céris, de qui il tenait ces renseignements, lui ayant dit seulement, à propos de la Bretagne, que le duc de Berry et le duc de Bourbon devaient prendre la direction du mouvement.

Il avoua que son commerce de liqueurs, comme le commerce de plombs de Gogué, n’était qu’un prétexte destiné à faciliter et à dissimuler, en les expliquant, les allées et venues, et le maniement de fonds qu’exigeait l’organisation du complot. Il dénonça ses complices, ceux que la police tenait déjà : Gogué, Turpault, Merland, Philippe Kémar, Bertrand-Saint-Hubert ; ceux qu’elle ne tenait pas encore : Henri Forestier, Élie Papin, Duchesne-Chénier, le chevalier de Céris, tous anciens chouans, et aussi Orion de la Floullière, dont les premières révélations de l’abbé Jacqueneau avaient établi la complicité. Il raconta enfin que l’agence recevait ses fonds de Madrid par l’intermédiaire d’un banquier de cette ville, Diego Carrera, Français émigré, naturalisé Espagnol. Diego Carrera tirait des traites tantôt sur Bathman de Bordeaux, tantôt sur Jean et Louis Batbédat de Bayonne, et le plus souvent à l’ordre d’un sieur Pignerolles, qui n’était autre que Henri Forestier, qualifié dans la correspondance propriétaire à La Havane. Ces traites étaient expédiées à divers négociants de Bordeaux qui les escomptaient, en attendant l’échéance, et en remettaient les fonds au chevalier de