Page:Daudet - La Police et les chouans sous le Consulat et l’Empire, 1895.djvu/154

Cette page n’a pas encore été corrigée

maintenant lieutenant des douanes à la direction de Lorient, était arrivé à Nantes en vertu d’un congé. Mais ce congé paraissait n’être qu’un prétexte. Turpault ne quittait plus Mme Bertrand-Saint-Hubert, installée dans cette ville depuis la disparition de son mari et surveillée par la police à raison du nom qu’elle portait. Un autre, Jean-Baptiste Gogué, ancien combattant en Vendée, où il était officier sous les ordres de Charette, établi depuis l’amnistie comme médecin à Boussaye, près Clisson, quittait fréquemment sa demeure sans rien trahir des motifs de ses absences. Daniel Daniaud-Duperrat, qui, lui aussi, avait fait le coup de feu contre les bleus, comme aide de camp de Lescure et de Sapinaud, et qui depuis tenait un magasin de liqueurs rue Jean-Jacques-Rousseau, à Nantes, partageait souvent l’existence nomade de Gogué. Un sieur Philippe Kémar, rentier à Clisson, se joignait à eux. À tout instant, ils partaient ensemble pour des destinations inconnues.

Des réunions dont la police locale, encore qu’elle en ignorât l’objet, connaissait l’existence avaient lieu fréquemment dans les châteaux de la Vendée. Beaucoup de jeunes gens s’y rencontraient. On les croyait résolus à soulever le pays. En attendant l’heure marquée pour ce soulèvement, plusieurs d’entre eux s’étaient rendus à Paris, soit pour y chercher les ressources nécessaires à leurs projets, soit pour mieux dissimuler leurs intentions.

Enfin, et c’était là ce que présentaient de plus inquiétant les avis du préfet de Nantes, il existait sur divers points du Bocage des dépôts de plomb, notamment chez l’abbé Jacqueneau, desservant de la Guyonnière.

Que ces avis arrivassent à la police par la préfecture de la Loire-Inférieure, alors qu’elle eût dû les recevoir par celle de la Vendée, c’est ce dont d’abord elle ne