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l’exécution était arrivé à Angers au moment où la tête de Canchy venait de tomber. Il n’y a pas trace de cet incident dans les pièces qui ont passé sous nos yeux, et les dispositions du premier Consul envers les chouans ne permettent pas d’y ajouter foi. Bonaparte avait voulu une condamnation et il entendait que le dernier mot de cette affaire restât à la loi.

À la distance où nous sommes de ces événements, alors que sont éteintes les passions ardentes qui les avaient rendus possibles, il est permis d’en parler en toute liberté. C’est même un devoir pour l’historien qui en entreprend le récit de tirer la vérité des obscurités et des contradictions qu’il rencontre sur son chemin. Or, la vérité, ici, n’est que trop claire. Ce furent bien les vrais coupables que condamna le tribunal d’Angers. S’il en eût été autrement, lorsque, après la chute de l’Empire, le gouvernement des Bourbons encourageait et accueillait les protestations des victimes frappées à tort, les descendants des condamnés du 2 novembre 1801 n’eussent pas manqué de protester et de réclamer justice.

À la preuve qui résulte de leur silence, vient s’ajouter celle qui résulte du silence de Bourmont. Les coupables, il les connaissait puisqu’il avait traité avec eux de la délivrance de M. Clément de Ris. Comment admettre que, leur ayant si longtemps survécu, il n’aurait pas considéré comme une obligation d’honneur de proclamer plus tard leur innocence et de dévoiler les intrigues qui les avaient envoyés à l’échafaud. Il s’est abstenu de le faire parce qu’il ne pouvait pas le faire. La protestation véhémente du capitaine Virot, membre du tribunal, ne saurait infirmer l’opinion que nous exprimons ici. En déclarant que les coupables étaient des agents de police connus de lui, et qu’il avait visé