Page:Daudet - L’Immortel (Lemerre 1890).djvu/207

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

celin. » Aux mardis surtout, l’indifférence de la salle très mondaine contrastait avec l’avant-scène où roucoulait, se pâmait, le corps hors la loge, ce bon gros pigeon aux yeux roses, ramageant tout haut ; « Oh ! ce Coquelin… Oh ! ce Delaunay !… quelle jeunesse !… quel théâtre !… » ne souffrant pas qu’on parlât d’autre chose, et, aux entr’actes, accueillant les visites par des cris d’admiration sur le génie de l’auteur académicien, les grâces de l’actrice sociétaire.

À l’entrée de Paul Astier, le rideau était levé, et connaissant les rites du culte, l’absolue défense de parler alors, de saluer, de remuer un fauteuil, il attendit immobile dans le petit salon séparé par une marche de l’avant-scène où Mme Ancelin s’extasiait entre Mme Astier et Mme Eviza, Danjou et de Freydet assis derrière elle avec des têtes de captifs. À ce claquement si particulier des fermetures de loge et que suivit un « Chut ! » foudroyant pour l’intrus qui troublait l’office, la mère à demi tournée tressaillit en voyant son Paul. Que se passait-il ? Qu’avait-il de si pressé, de si grave à lui dire,