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Plus romanesque et sentimentale, Mme Ebsen était surtout impressionnée par les belles façons du monsieur et le grand crêpe de son chapeau, un deuil de veuf, bien sûr, puisqu’on ne voyait jamais la mère. Et c’était entre les deux femmes de longues discussions au sujet des voisins.

Éline, tout le jour à ses leçons, se mêlait de moins près à l’existence des Lorie, mais ces petits sans mère, perdus et seuls dans Paris, la remplissaient de pitié, et à chaque rencontre, elle leur souriait, essayait d’entrer en connaissance malgré les résistances du bonnet berrichon. La veille de Noël, le soir de cette « Juleaften » des Danois que les dames Ebsen ne manquaient jamais de fêter, elle descendit inviter les enfants à venir avec d’autres petits de leur âge manger le « risengrœd » et toutes les sucreries accrochées aux branchettes d’un arbre de Noël, parmi les cires allumées et les lanternes minuscules.

Et pensez quel chagrin pour les pauvres petiots cachés derrière Sylvanire qui se tenait debout en travers de la porte, quel crève-cœur de l’entendre répondre que les enfants ne sortaient