Page:Daudet - L'Évangéliste, 1883.djvu/375

Cette page n’a pas encore été corrigée

embarrassés… À Zurich, elle avait été un mois malade… Elle avait fait beaucoup de bien à Manchester… Et de temps en temps, une phrase de la Bible, une exhortation pieuse : « Souffrons en Christ, ma mère, et nous régnerons avec lui. » Et la mère de se dire encore : « Ô ma jolie petite Lina, ils me l’ont toute chanchée… »

Enfin l’essentiel était de l’avoir là, tout près dans sa petite chambre, où Lina rentrait de bonne heure, prétextant sa fatigue, pendant que Mme Ebsen veillait au contraire, pressée de se réinstaller, de reprendre ses habitudes dans le cher logis si longtemps abandonné, et s’arrêtait à toute minute au milieu de ses arrangements, avec le sentiment délicieux de la paix retrouvée, de la maison pleine, après tant d’heures de désespoir et de solitude.

La rue dormait. Par-dessus les arbres des jardins, Saint-Jacques-du-Haut-Pas envoyait le timbre grave de l’heure, et Bullier les ritournelles coupées de ses violons. Plus rien ne bougeait chez Éline. Pourtant sa lumière veillait encore. « Elle aura oublié d’éteindre… » pensa Mme Ebsen, qui entra doucement… La jeune fille était à genoux sur le carreau de la chambre, la