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des cadeaux de ses dévotes. Et chaque fois, en la reconduisant : « Il faut vous distraire, pauvre amie… »

Mais le moyen de se distraire avec cette angoisse obsédante, cette idée fixe que tout ravivait ? Éline en partant n’avait emporté ni vêtements, ni linge, la maison restait pleine d’elle ; et de l’armoire, du tiroir ouvert, le léger parfum dont elle avait l’habitude, la moindre fantaisie de toilette donnait à la mère une expression vivante de son enfant. Il restait encore sur la table le long cahier vert dans lequel la jeune fille chaque soir inscrivait leur petite dépense en face des leçons à toucher. Ce cahier ordonné, soigné, aux lignes de chiffres régulières, racontait l’enfant jour par jour, sa vie honnête et courageuse, si serrée de travail, si occupée du bien-être des autres… Un manteau pour Fanny… Prêté à Henriette… Le jour de Sainte-Élisabeth, la fête de Mme Ebsen, à côté de bouquets et surprise, un ligne enfantine et tendre suivait en marge : J’aime ma chère maman.

Un vrai livre de raison comme il s’en conservait autrefois dans les familles et que le vieux Montaigne trouvait « si plaisants à voir, très à