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ce mode d’éducation ; aussi occupe-t-il presque toujours le bout d’honneur vis-à-vis de la présidente. Celui-là sait l’Écriture par cœur, tous les Évangiles selon Luc, Jean, Marc, Mathieu, le Deutéronome, les psaumes, les épîtres de Paul ; et à tout propos, sans qu’on l’interroge, il fait tout haut une citation inconsciente, inarticulée, qui semble sortir du cornet d’un phonographe.

Autour de lui, on se tait et on admire : C’est Dieu qui parle par la bouche de cet adolescent. Et quelle bouche ! Quand on pense à tout ce qu’elle charriait d’impiétés et d’abominations, il y a trois ans, sur le préau des jeunes détenus ! N’est-ce pas miraculeux, et le plus éclatant témoignage en faveur des écoles évangéliques ? D’autant qu’il reste encore sur Nicolas quelques souillures de l’ancien péché, mensonge, gourmandise, prévarication ; et que l’on a souvent l’édifiant spectacle des combats que se livrent le bon et le mauvais esprit dans cette conscience mal blanchie, dans cette parole où l’Ecclésiaste corrige à grand peine l’argot des prisons.

C’est à côté de ce phénomène qu’Éline Ebsen prend place, les jours où elle déjeune au château.