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nifestement ta vocation. Et puis, vois-tu, mon enfant, en général, il faut n’avoir de relations qu’avec les gens de son monde, de son métier, rester, autant que possible, dans son milieu. On risque, sans cela, de se décourager, de se laisser aller à toutes sortes d’aspirations chimériques, qui font les existences déclassées.

« Quant à ton amitié pour la petite Cécile, M. d’Argenton trouve encore, et je suis bien de son avis, que ce sont là de ces enfantillages qui ne doivent avoir qu’un temps ; sans quoi ils vous encombrent la vie, vous amollissent, vous détournent de tout vrai et droit chemin. Tu feras donc sagement d’interrompre des relations qui n’ont pu que t’être nuisibles et qui ne sont peut-être pas étrangères au refroidissement singulier que tu montres pour une carrière entreprise de plein gré et avec beaucoup d’ardeur. Tu comprendras, je l’espère, mon cher enfant, que je te parle ainsi dans ton intérêt. Songe que tu vas avoir quinze ans, que tu as dans les mains un bon métier, un avenir ouvert devant toi, et ne donne pas raison à ceux qui ont prédit que tu ne ferais jamais rien de bon.

« Ta mère qui t’aime,

« CHARLOTTE. »

« Post scriptum. — Dix heures du soir. — Mon chéri, ces messieurs viennent de monter. J’en profite pour ajouter un petit bonsoir à ma lettre, ce que je te dirais si tu étais là, près de moi. Ne te décourage pas,