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à toutes ces petites cours l’air de prisons numérotées, pour connaître certains animaux de son pays. Avec un sentiment mêlé de plaisir et de peine, il regardait les kanguroos dressés sur leurs pattes si longues, qu’elles ont l’agilité et l’élan d’une paire d’ailes. On eût dit qu’il compatissait à leur dépaysement, qu’il souffrait de les voir dans ce court espace qu’ils franchissaient en trois sauts pour revenir à leur petite cabane avec cette précipitation de l’animal domestique qui sait le refuge et la nécessité du gîte.

Il s’arrêtait devant ces grilles légères, peintes en clair pour plus d’illusion, où les onagres, les antilopes étaient parqués, sans pitié pour leurs sabots fins, si légers, si agiles ; et il y avait des petits coins de verdure pelée, des versants de monticules si pauvres d’herbes, que tout à coup quelque fragment lointain de paysage brûlé se levait pour Mâdou au passage de ces trots rapides.

Les oiseaux enfermés l’apitoyaient surtout. Au moins les autruches, les casoars, logés solitairement au grand air avec un arbuste exotique qui les accompagne dans la perspective des allées comme sur une estampe d’histoire naturelle, avaient-ils la place de s’étendre, de gratter au soleil parmi les cailloux cette terre neuve, remuée, rapportée, qui garde éternellement au Jardin d’acclimatation une physionomie de chose improvisée. Mais que les perruches, les aras semblaient tristes dans cette longue cage séparée en compartiments uniformes, dont chacun s’orne d’un