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– Oh ! les beaux vers luisants… dit la jeune fille, que ce silence, traversé de tant de bruits mystérieux embarrassait.

Au bord de la pelouse, de petites lumières vertes haletantes, éclairaient les brins d’herbe. Elle se baissa pour en prendre une sur son gant. Il vint s’agenouiller tout près d’elle, et penchés jusqu’au ras de l’herbe, frôlant leurs cheveux et leurs joues, ils se regardèrent une minute à la clarté des vers luisants. Qu’elle lui parut étrange et charmante, sous ce reflet vert qui montait vers sa figure inclinée et se vaporisait dans le réseau fin de ses cheveux ondés !… Il avait passé un bras autour de sa taille, et tout à coup, sentant qu’elle s’abandonnait, il l’étreignit contre lui, longuement, éperdument.

– Qu’est-ce que vous cherchez donc ? demanda Claire debout dans l’ombre derrière eux.

Saisi, la gorge serrée, Georges tremblait si fort qu’il ne put répondre. Sidonie, au contraire, se releva avec le plus grand calme, et dit en faisant bouffer sa jupe :

– Ce sont les vers luisants… Vois comme il y en a ce soir… Et comme ils brillent.

Ses yeux aussi brillaient d’un éclat extraordinaire.

– C’est l’orage sans doute… murmura Georges, encore tout frissonnant.

En effet, l’orage était proche. Par moments, de grands tourbillons de feuilles et de poussière couraient d’un bout à l’autre de la charmille. Ils firent encore quelques pas, puis rentrèrent tous trois dans le salon. Les