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Il y avait un tel accent dans ces paroles, la façon dont son gendre le secouait en parlant était si éloquente que M. Chèbe fut tout de suite convaincu. Il balbutia même des excuses. Certainement Risler avait raison d’agir ainsi. Tous les honnêtes gens seraient pour lui… Et il se reculait à mesure vers la porte. Arrivé là, il demanda timidement si la petite pension de madame Chèbe serait continuée.

– Oui, répondit Risler, mais ne la dépassez jamais, car maintenant ma position ici n’est plus la même. Je ne suis plus l’associé de la maison.

M. Chèbe ouvrit de grands yeux étonnés, et prit cette physionomie idiote qui faisait croire à beaucoup de gens que l’accident qui lui était arrivé, vous savez, tout pareil à celui du duc d’Orléans, n’était pas un conte de son invention ; mais il n’osa pas faire la moindre observation. On lui avait changé son gendre, positivement. Était-ce bien Risler, cette espèce de chat-tigre, qui se hérissait au moindre mot, et ne parlait de rien moins que de tuer les gens ?

Il s’esquiva, reprit son aplomb seulement au bas de l’escalier, et traversa la cour en marchant d’un air vainqueur. Quand toutes les pièces furent démeublées et vides, Risler les parcourut une dernière fois, puis il prit la clef et descendit chez Planus pour la remettre à madame Georges.

– Vous pourrez louer l’appartement, dit-il, ce sera un apport de plus à la fabrique.

– Mais vous, mon ami ?