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Tout à coup la grande taille de Risler se dressa devant la porte :

– Par ici, Chèbe, par ici. Ils sont dans le pavillon.

En même temps le brave homme entra, escorté de son beau-père et de sa belle-mère, qu’il était allé chercher. Il y eut un moment d’effusion et d’innombrables accolades. Il fallait voir de quel air protecteur M. Chèbe examinait le grand garçon qui avait la tête et les épaules de plus que lui :

– Eh bien, mon petit, ça va-t-il comme vous voulez, ce canal de Suez ?

Madame Chèbe, pour qui Frantz était toujours resté un peu son futur gendre, l’embrassait à tour de bras, pendant que Risler maladroit à son ordinaire dans ses gaietés et ses expansions, faisait de grands gestes sur le perron, parlait de tuer plusieurs veaux gras pour le retour de l’enfant prodigue, et d’une voix bruyante, qui devait retentir dans tous les jardins environnants, criait à la maîtresse de chant :

– Madame Dobson, madame Dobson…, sans vous commander, c’est trop triste ce que vous chantez là… Au diable l’expression pour aujourd’hui… Jouez-nous donc plutôt quelque chose de bien gai, de bien dansant, que je fasse faire un tour de valse à madame Chèbe…

– Risler, Risler, êtes-vous fou ? mon gendre !…

– Allons, allons, maman… Il le faut… hop !…

Lourdement, autour des allées, il entraînait dans une valse automatique à six temps, une vraie valse de Vaucanson, la belle-maman essoufflée qui s’arrêtait à