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allées bien alignées, des tonnelles arrondies, les arrosoirs près du bassin et des ustensiles de jardinier appuyés à la maisonnette. Ce n’était rien qu’une maison de paysan, équilibrée sur ce terrain en pente par un petit escalier, qui plaçait le côté de l’ombre au premier, celui du midi au rez-de-chaussée. De ce côté-là, on aurait dit une serre. Il y avait des cloches de verre empilées sur les marches, des pots à fleurs vides, renversés, d’autres rangés avec des géraniums, des verveines sur le sable chaud et blanc. Du reste, à part deux ou trois grands platanes, le jardin était tout au soleil. Des arbres fruitiers en éventail sur des fils de fer, ou bien en espalier, s’étalaient à la grande lumière, un peu défeuillés, là seulement pour le fruit. C’était aussi des plants de fraisiers, des pois à grandes rames ; et au milieu de tout cela, dans cet ordre et ce calme, un vieux, à chapeau de paille, qui circulait tout le jour par les allées, arrosait aux heures fraîches, coupait, émondait les branches et les bordures.

Ce vieux ne connaissait personne dans le pays. Excepté la voiture du boulanger, qui s’arrêtait à toutes les portes dans l’unique rue du village, il n’avait jamais de visite. Parfois, quelque passant, en quête d’un de ces terrains à mi-côte qui sont tous très fertiles et font de charmants vergers, s’arrêtait pour sonner en