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LE TURCO DE LA COMMUNE



C’était un petit timbalier de tirailleurs indigènes. Il s’appelait Kadour, venait de la tribu du Djendel, et faisait partie de cette poignée de turcos qui s’étaient jetés dans Paris à la suite de l’armée de Vinoy. De Wissembourg jusqu’à Champigny, il avait fait toute la campagne, traversant les champs de bataille comme un oiseau de tempête, avec ses cliquettes de fer et sa derbouka (tambour arabe) ; si vif, si remuant, que les balles ne savaient où le prendre. Mais quand l’hiver fut venu, ce petit bronze africain rougi au feu de la mitraille ne put supporter les nuits de grand’garde, l’immobilité dans la neige ; et, un matin de janvier, on le ramassa au bord de la Marne, les pieds gelés, tordu par le froid. Il resta