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LES ROIS EN EXIL

billes avec ardeur, au grand désespoir d’Élisée qui brûlait d’aller annoncer à la reine le succès d’une négociation dont elle n’avait pas voulu se charger elle-même ; car ce fantôme de roi lui imposait encore et ce n’est qu’en tremblant qu’elle portait la main sur cette couronne dont il ne voulait plus.

L’abdication eut lieu à quelque temps de là. Stoïquement, le chef de la maison civile et militaire proposa les splendides galeries de l’hôtel Rosen pour cette cérémonie à laquelle il est d’usage de donner le plus de solennité, d’authenticité possible. Mais le sinistre de Gravosa était trop récent encore pour ces salons remplis des échos de la dernière fête ; c’eût été vraiment trop triste et d’un mauvais présage pour le règne à venir. On se contenta donc de réunir à Saint-Mandé quelques nobles familles illyriennes ou françaises dont le paraphe était nécessaire au bas d’un acte de cette importance.

À deux heures, les voitures commencèrent à arriver, les coups de timbre se succédèrent, pendant que sur les grands tapis déroulés du seuil jusqu’au bas du perron les invités montaient lentement, reçus à l’entrée du salon par le duc de Rosen sanglé dans son costume de général, portant autour du cou, en travers de ses croix, ce grand cordon d’Illyrie qu’il avait quitté sans rien dire, quand il apprit le scan-