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L’ÉMANCIPATION DE LA FEMME

le droit et le devoir des hommes, elles se trouveraient bientôt plus compétentes et meilleurs juges que le clergé sur ces questions, et il n’y aurait pas le moindre danger d’abdication de leur jugement personnel entre les mains de leurs professeurs cléricaux. Tout ce qu’il y a d’excessif et de préjudiciable dans l’influence que les prêtres ont sur elles, s’affaiblirait exactement en proportion de la participation qu’elles auraient aux affaires de la vie, et il n’en resterait que le côté salutaire. Au lieu donc de regarder l’influence cléricale comme un obstacle au suffrage des femmes, je considère le vote comme le moyen le plus efficace de les affranchir de l’influence trop exclusive des prêtres. Mais quand ce danger serait beaucoup plus grand qu’il ne l’est, ce serait une chose indigne, pour de telles craintes, de refuser à une moitié de l’espèce les moyens nécessaires de protection personnelle, si grandement estimés par l’autre moitié. Chaque partie de l’humanité a ses dangers particuliers d’erreur, et celui qui refuserait le suffrage aux autres, parce qu’il craint qu’ils ne se trompent, trouverait de bonnes raisons pour priver tout le monde du droit électoral, excepté lui-même. Le salut, loin de dépendre de l’exclusion de quelques-uns, repose sur l’admission de tous, afin que les erreurs et les excès contraires puissent mutuellement se neutraliser. Et de tous ceux qui jamais ont revendiqué le suffrage ou pour lesquels on l’a jamais revendiqué, il n’y en a aucun à l’égard desquels on donne de si pauvres raisons d’appréhension sur les mauvaises conséquences de la reconnaissance de leur droit ; aucun dont l’exclusion constante repose sur des excuses aussi insignifiantes et aussi puériles que celles qu’on apporte à l’égard des femmes. »