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L’ÉMANCIPATION DE LA FEMME

peuples puissants par des gouvernants et des lois respectables et respectés.

Malheureusement nos vues sur le droit et sur le devoir social sont si confuses, qu’un certain parti honnête prétend ne pouvoir faire revivre les principes en France qu’en les y incarnant dans telle ou telle dynastie. Pourtant nos monarchies de triste figure, et de mémoire encore plus triste, ont toutes fait leurs preuves à ce sujet. N’est-ce pas la Restauration qui a gravé sur le bronze des lois cette illustre sottise : la vie privée doit être murée ? Ne sont-ce point nos autres dynasties qui ont élevé sur le pavois tous les désordres qui découlent de cette maxime à jamais licencieuse et destructive ? Comme en faisant trembler les bons et en rassurant les méchants, elle a enfanté quatre révolutions déjà ; comme elle nous apporte une décadence inévitable, nous la soumettons aux méditations du nouveau messie de la légitimité, qui se dit la voie, la vérité et la vie ; nous lui demandons d’exercer dans le temps le jugement qu’il nous promet dans l’éternité, pour la glorification des justes et la confusion des pécheurs ; qu’il sépare au plus vite la paille du froment ; qu’il ne confonde point, à l’exemple de ses pères, les boucs et les brebis ; sinon nous lui dirons humblement : « Prince, croyez-vous, en vérité, que quand le fils de l’homme viendra, il trouve encore de la justice sur la terre ? »

Mais au reste pourquoi ne ferions-nous pas nos petites affaires, et ne nous donnerions-nous point des principes, sans la procuration de M. le comte de Chambord ? Qui nous empêche de prendre dès aujourd’hui en main le marteau démolisseur du mur de la vie privée, et de faire passer sur ses ruines souillées un fleuve purificateur ?

Cessons donc, en mettant les gens malhonnêtes sous l’égide de la jurisprudence, de protéger des vices plus redoutables pour nous que tous les ennemis extérieurs. Si nous voulons avoir la sainte horreur de l’arbitraire, le respect pour la famille, pour l’autorité, pour l’individu, pour l’inviolabilité du foyer, que professent les Anglais et les Américains, étudions, appliquons au plus vite leurs