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aimables que les habitants de l’île de Chiloé, originaires d’un mélange, en proportions variées, d’Indiens et d’Espagnols. D’autre part, il y a bien des années, et longtemps avant de songer au sujet que je traite actuellement, je fus frappé du fait que, dans l’Amérique du Sud, les hommes provenant d’un mélange complexe de Nègres, d’Indiens et d’Espagnols avaient rarement, quelle qu’en puisse être la cause, une bonne expression[1]. Après avoir décrit un métis du Zambesi, que les Portugais lui signalaient comme un monstre d’inhumanité rare, Livingstone remarque : « Il est incompréhensible pourquoi les métis, comme l’homme en question, sont tellement plus cruels que les Portugais, mais le fait est incontestable. » Un habitant disait à Livingstone : « Dieu a fait l’homme blanc, et Dieu a fait l’homme noir ; mais c’est le diable qui a fait les métis[2]. » Lorsque deux races, toutes deux inférieures dans l’échelle, se croisent, leurs produits paraissent être éminemment mauvais. Ainsi le grand Humboldt, qui ne partageait aucun de ces préjugés contre les races inférieures qui règnent actuellement si fortement en Angleterre, s’exprime en termes énergiques sur les dispositions sauvages et mauvaises des Zambos, ou métis des Indiens et des Nègres, et plusieurs observateurs ont confirmé sa manière de voir[3]. Ces faits doivent peut-être nous faire admettre que l’état de dégradation dans lequel se trouvent tant de métis, peut être attribué autant à un retour vers une condition primitive et sauvage, déterminé par le croisement, qu’aux détestables conditions morales dans lesquelles ils se trouvent généralement.

Résumé des causes prochaines déterminant le retour. — Lorsque des animaux ou des plantes de races pures reprennent des caractères depuis longtemps perdus, — comme lorsque l’âne présente des barres transversales sur les jambes, ou lorsque des races pures, noires ou blanches de pigeons, produisent un oiseau bleu ardoisé, ou quand une pensée cultivée, à fleurs grandes et rondes, donne de graine une plante à fleurs petites et allongées, — il nous est impossible de dire quelle peut être la cause prochaine du phénomène. La ten-

  1. Journal of Researches, 1845, p. 71.
  2. Expedition to the Zambesi, 1865, p. 25, 150.
  3. Dr Broca, de l’Hybridité dans le genre Homo, 1864.