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RETOUR.

autrefois à l’espèce, et avaient été perdus dès une époque plus ou moins reculée. Ainsi, d’après Azara[1], les veaux d’une race de bétail sans cornes, originaire de Corrientes, qui sont d’abord dépourvus de ces appendices, acquièrent quelquefois, en devenant adultes, de petites cornes lâches et tordues, qui, par la suite, se fixent parfois sur le crâne. Les Bantams blancs, ainsi que les noirs, qui les uns et les autres se propagent avec constance, revêtent quelquefois, en vieillissant, un plumage jaunâtre ou rouge. On a décrit, par exemple, un Bantam noir de premier ordre, qui, pendant trois saisons, avait été d’un noir parfait, puis devint ensuite, toutes les années, de plus en plus rouge ; il faut noter que, quand cette tendance au changement de couleur existe chez le Bantam, elle est presque certainement héréditaire[2]. Dans le coq Dorking coucou, ou à plumage bleu marbré, les plumes sétiformes, qui sont normalement d’un bleu grisâtre, deviennent quelquefois jaunes ou orangées, lorsqu’il avance en âge[3]. Or, comme le Gallus bankiva est coloré de rouge et d’orange, et que les Dorkings, ainsi que les Bantams, proviennent de cette espèce, nous ne pouvons mettre en doute que le changement qui se manifeste occasionnellement chez ces oiseaux, à mesure qu’ils vieillissent, ne soit le résultat d’une tendance chez l’individu à faire retour au type primitif.

Le croisement considéré comme cause directe de retour. — On sait depuis longtemps que les hybrides font souvent retour à l’une ou l’autre de leurs formes parentes, ou à toutes deux, après un intervalle de deux à sept ou huit générations, et, suivant quelques autorités, après un plus grand nombre encore. Mais que le croisement par lui-même détermine le retour, en tant que provoquant la réapparition de caractères depuis longtemps perdus, c’est, à ce que je crois, ce qu’on n’a jamais encore démontré. La preuve en est donnée par certaines particularités, qui, ne caractérisant pas les parents immédiats, ne peuvent par conséquent provenir d’eux, mais apparaissent souvent dans la progéniture de deux races croisées, tandis qu’elles ne se présentent jamais, ou du moins sont extrêmement rares,

  1. Hist. nat. du Paraguay, t. II, 1801, p. 372.
  2. M. Hewitt, dans Tegetmeier’s Poultry Book, 1866, p. 248.
  3. Tegetmeier, ibid., p. 97.