Page:Darwin - De la variation des animaux et des plantes sous l'action de la domestication, tome 2, 1868.djvu/460

Cette page a été validée par deux contributeurs.
453
REMARQUES FINALES

mais si le moindre choix préside à la conservation des uns et à la destruction des autres, le résultat sera complétement changé. Que le propriétaire remarque une légère variation dans un de ses oiseaux, et désire former une race possédant ce caractère, il y arrivera en fort peu de temps par un appariage convenable et une sélection soigneuse des jeunes. Comme toute partie qui a une fois varié continue généralement à varier dans la même direction, il est facile, en conservant toujours les individus les plus fortement caractérisés, d’augmenter la somme des différences jusqu’à ce que le type de perfection qu’on a déterminé d’avance soit atteint ; c’est là de la sélection méthodique.

Si le propriétaire de la volière, sans songer à la création d’une race nouvelle, mais admirant simplement davantage, par exemple, les becs courts que les longs, veut réduire le nombre de ses oiseaux, il sacrifiera généralement les derniers, et il n’est pas douteux qu’avec le temps, il ne modifie sensiblement sa souche. Il est peu probable que deux personnes élevant des pigeons et agissant de cette manière, se trouvent préférer exactement les mêmes caractères ; nous savons, au contraire, qu’elles rechercheraient plutôt les caractères directement opposés, et que les deux lots finiraient définitivement par être différents. C’est ce qui est effectivement arrivé pour les familles de bétail, de moutons et de pigeons, qui ont été longtemps conservées, et dont les éleveurs se sont soigneusement occupé, sans aucune intention, de produire de nouvelles sous-races distinctes. Ce genre de sélection inconsciente interviendra plus spécialement chez les animaux qui sont utiles à l’homme ; car chacun cherchant à obtenir les meilleurs chiens, chevaux, vaches ou moutons, ces animaux transmettront plus ou moins sûrement leurs bonnes qualités à leur progéniture. Personne ne pousse la négligence jusqu’à faire reproduire les animaux les plus inférieurs ; car même lorsque les sauvages sont forcés, par le besoin, de tuer quelques-uns de leurs animaux, ils sacrifient les moins bons et conservent les meilleurs. Pour les animaux qu’on élève pour l’usage et non comme simple amusement, différentes modes prévalent suivant les endroits, et déterminent la conservation et par conséquent la transmission d’une foule de particularités insignifiantes. La même marche a été suivie pour la culture de nos arbres fruitiers et de nos légumes,