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HYPOTHÈSE PROVISOIRE.

cas, chez les êtres organisés variables, les affinités mutuelles des cellules et des gemmules sont modifiées, de sorte que certaines parties sont multipliées ou transposées ; et il semble qu’un léger changement dans la constitution d’un animal, lié à l’état des organes reproducteurs, entraîne une modification dans les affinités des tissus des diverses parties du corps. Ainsi, lorsque les animaux mâles atteignent l’âge de puberté, et ensuite à chaque nouvelle saison, certaines cellules acquièrent quelque affinité pour certaines gemmules, qui se développent et forment les caractères masculins secondaires ; mais si les organes reproducteurs sont détruits, ou même temporairement troublés par des changements de conditions, ces affinités ne sont pas excitées. Néanmoins, avant qu’il arrive à la puberté, et dans l’intervalle des époques de la reproduction, le mâle doit renfermer à un état latent les gemmules nécessaires. Le cas singulier que nous avons cité d’une poule ayant revêtu les caractères masculins, non de sa propre race, mais d’un ancêtre éloigné, démontre la connexion qui existe entre les caractères sexuels latents et le retour ordinaire. Chez les animaux ou plantes qui produisent ordinairement plusieurs formes, comme certains papillons décrits par M. Wallace, chez lesquels il existe trois formes femelles et le mâle, ou les espèces trimorphes de Lythrum et d’Oxalis, il faut qu’il y ait, dans chaque individu, des gemmules latentes propres à reproduire ces formes très-diverses.

On peut appliquer le principe de latence des caractères, combiné avec la transposition des organes, à ces cas singuliers de papillons et d’autres insectes, dans lesquels une moitié ou un quart du corps ressemblent au mâle et le reste à la femelle ; d’où il résulte que les côtés opposés du corps, séparés par une ligne tranchée, diffèrent quelquefois de la manière la plus apparente. On peut encore l’appliquer aux cas cités dans le treizième chapitre, relatifs à la différence qui se remarque entre les côtés droit et gauche du corps, dans l’enroulement en spirale de certains mollusques, et dans le genre Verrucaria chez les Cirrhipèdes ; car on sait que dans ces cas, l’un et l’autre côté peuvent indifféremment présenter le même changement remarquable de développement.

Le retour, dans le sens ordinaire du mot, intervient si