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LOIS DE LA VARIATION.

velles variétés de pois, a constaté chez le Blue Impérial une forte tendance à faire retour à sa souche parente, retour qui a lieu de la manière suivante : « le dernier pois de la gousse (ou celui qui est le plus en dessus) est souvent beaucoup plus petit que les autres ; et si on recueille ces pois et qu’on les sème à part, un beaucoup plus grand nombre d’entre eux feront retour à la forme originelle que ceux pris dans d’autres parties de la gousse. » M. Chaté[1] dit qu’en levant des giroflées de semis, il réussit à en obtenir quatre-vingts pour cent à fleurs doubles, en ne laissant grainer que quelques branches secondaires ; mais, en outre, au moment de recueillir les graines, il faut mettre à part celles de la partie supérieure des gousses, parce qu’on a reconnu que les plantes provenant des graines situées dans cette partie, donnent quatre-vingts pour cent de fleurs simples. Or, la production de fleurs simples par des graines de fleurs doubles est un cas très-clair de retour. Ces faits, ainsi que la connexion qui paraît exister entre la position centrale, la pélorie et la prolification, montrent donc d’une manière fort intéressante qu’il suffit d’une bien petite différence, — telle qu’une arrivée plus facile de la sève vers une partie d’une même plante — pour déterminer d’importants changements de conformation.


Variation analogique ou parallèle. — Je veux par cette dénomination exprimer le fait que des caractères similaires apparaissent occasionnellement dans les diverses races ou variétés descendant d’une même espèce, mais beaucoup plus rarement dans celles qui proviennent d’espèces fort distinctes. Il s’agit donc ici, non pas comme jusqu’à présent des causes de la variation, mais de ses résultats. Les variations analogiques, au point de vue de leur origine, peuvent être groupées sous deux chefs principaux : le premier comprenant celles dues à des causes inconnues agissant sur des êtres organisés ayant à peu près la même constitution, et qui, en conséquence, varient d’une manière semblable ; le second, les variations dues à une réapparition de caractères ayant appartenu à un ancêtre plus ou moins éloigné. Ces deux divisions principales ne peuvent cependant n’être séparées que théoriquement ; car, comme nous le verrons bientôt, elles passent graduellement l’une dans l’autre.


Nous pouvons ranger dans le premier groupe de variations analogiques dues au retour, les nombreux cas d’arbres appartenant à des ordres bien différents qui ont donné naissance à des variétés pleureuses et fastigiées. Le hêtre, le noisetier et l’épine-vinette ont produit des variétés à feuilles pourpres, et comme le remarque Bernhardi, une multitude de plantes les

  1. Cité dans Gardener’s Chronicle, 1866, p. 74.