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LOIS DE LA VARIATION.

des dents, avait une apparence de gorille. Ces cas, ainsi que ceux des chiens nus, nous font penser au fait que deux ordres de mammifères, — les Édentés et les Cétacés, — dont les enveloppes dermiques sont fort anormales, le sont encore plus aussi par le manque ou la surabondance des dents.

On considère généralement les organes de la vue et de l’ouïe, comme homologues tant entre eux qu’avec les divers appendices dermiques ; ces différentes parties sont donc susceptibles d’être affectées ensemble d’une manière anormale. M. White Cooper remarque que tous les cas de double microphthalmie qu’il a pu observer ont été accompagnés d’un état défectueux du système dentaire. Certaines formes de cécité semblent être associées à la couleur des cheveux ; deux époux, tous deux de bonne constitution, le mari étant brun et la femme blonde, eurent neuf enfants, qui tous naquirent aveugles ; cinq d’entre eux, à cheveux foncés et iris brun, furent atteints d’amaurose, les quatre autres blonds à iris bleu, furent à la fois affectés d’amaurose et de cataracte. On pourrait citer plusieurs exemples prouvant qu’il existe quelque relation entre diverses affections des yeux et des oreilles ; ainsi Liebreich constate que sur deux cent quarante et un sourds-muets à Berlin, quatorze étaient affectés de rétinite pigmentaire. M. White Cooper et le Dr Earle ont remarqué que le daltonisme, ou incapacité à distinguer les diverses couleurs, est souvent accompagné d’une incapacité correspondante à distinguer les sons musicaux[1].

Un cas curieux est celui des chats blancs qui sont presque toujours sourds lorsqu’ils ont les yeux bleus. J’ai cru autrefois que la règle était invariable, mais j’ai depuis eu connaissance de quelques exceptions authentiques. Les deux premiers cas furent publiés en 1829 et se rapportaient à des chats anglais et persans ; le Rév. W. T. Bree, qui possédait une chatte de cette dernière race, constate que dans ses produits d’une même portée, tous ceux qui, comme la mère, étaient blancs aux yeux bleus, furent sourds comme elle, tandis que ceux qui portaient la moindre marque colorée sur leur fourrure, eurent l’ouïe parfaitement développée[2]. Le Rév. W. Darwin-Fox

  1. M. Sedgwick, Medico-Chirurg. Review, juillet 1861, p. 198 ; avril 1863, p. 455 et 458. — Professeur Devay, Mariages consanguins, 1862, p. 116. Cit. Liebreich.
  2. Loudon’s, Mag. of Nat. Hist., t. I, 1829, p. 66, 178. — Dr P. Lucas, Héréd. nat., t. I, p. 423, pour l’hérédité de la surdité chez les chats.