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LOIS DE LA VARIATION.

tive. Si les naturalistes qui admettent l’homologie des maxillaires et des os des membres sont dans le vrai, nous pourrions alors comprendre pourquoi la tête et les membres tendent à varier ensemble par la forme et même la couleur ; mais la justesse de ce rapprochement est contestée par plusieurs juges des plus compétents.

La position pendante des énormes oreilles des lapins de fantaisie est due en partie à l’atrophie des muscles résultant d’un défaut d’usage, et en partie au poids et à la longueur des oreilles, points auxquels on a, pendant un grand nombre de générations, appliqué la sélection. Cet accroissement des oreilles et leur changement de position ont, non-seulement déterminé une modification dans la forme, la dimension et la direction du méat auditif, mais ont légèrement affecté le crâne tout entier ; c’est ce qui est très-évident chez les lapins demi-lopes, qui n’ayant qu’une oreille pendante, n’ont pas les deux moitiés de leur crâne complétement symétriques. Il y a donc là un cas curieux de corrélation, entre des os durs et des organes aussi mous et, physiologiquement parlant, aussi insignifiants que les oreilles externes. Le résultat est certainement en grande partie dû à l’action purement mécanique du poids des oreilles, de même que la pression peut aisément modifier le crâne des enfants.

La peau et ses appendices, poils, plumes, sabots, cornes et dents, sont homologues dans le corps entier. Les couleurs de la peau et des poils varient généralement ensemble ; Virgile recommande aux bergers de vérifier que la bouche et la langue du bélier ne soient pas noires, de crainte qu’ils n’engendrent pas des agneaux d’un blanc pur. Nous avons vu, dans l’espèce galline et les canards, qu’il y a quelque connexion entre la couleur du plumage et celle de la coquille de l’œuf, — soit la muqueuse qui la sécrète. Dans une même race humaine[1] il y en a une également entre la couleur de la peau et des cheveux, et l’odeur émise par les glandes cutanées ; les poils varient généralement d’une même manière sur tout le corps par la longueur, la finesse ou la frisure. Le fait est également vrai pour les plumes, comme le montrent les races frisées de poules et de pigeons.

  1. Godron, de l’Espèce, t. II, p. 217.