Page:Darwin - De la variation des animaux et des plantes sous l'action de la domestication, tome 2, 1868.djvu/349

Cette page a été validée par deux contributeurs.
342
LOIS DE LA VARIATION.

la première. Isidore Geoffroy Saint-Hilaire[1] constate que cela s’observe constamment dans les monstruosités des animaux, et Moquin-Tandon[2] remarque que dans les plantes, l’axe ne pouvant devenir monstrueux sans affecter de quelque manière les organes qu’il produit subséquemment, les anomalies de l’axe sont presque toujours accompagnées de déviations de conformation dans les appendices qui en partent. Nous verrons plus bas que dans les races de chiens à museau court, certains changements histologiques dans les éléments primitifs des os arrêtent leur développement et les raccourcissent, ce qui modifie la position des dents molaires qui se développeront plus tard. Il est probable que certaines modifications dans les larves doivent affecter la conformation de l’insecte parfait. Mais il ne faut pas aller trop loin dans ce sens, car pendant le cours normal du développement, on sait que certains membres d’un même groupe d’animaux subissent une suite de changements extraordinaires, tandis que d’autres, qui en sont fort voisins, arrivent à l’état parfait après peu de changements dans leur conformation.

Parmi les cas simples de corrélation, se trouve celui où certains organes augmentent ou diminuent de nombre, ou sont autrement modifiés, en même temps que l’accroissement ou la diminution des dimensions du corps entier, ou d’un organe particulier. Ainsi les éleveurs de pigeons de fantaisie ont cherché à développer chez les Grosses-gorges la longueur du corps, et nous avons vu que leurs vertèbres ont augmenté de nombre, et que leurs côtes se sont élargies. On a au contraire cherché à réduire le corps des Culbutants, dont le nombre des côtes et des rémiges primaires a diminué. On s’est appliqué chez les pigeons-Paons à développer leur queue si fortement étalée et formée de nombreuses rectrices, et les vertèbres caudales ont également augmenté de grosseur et de nombre. Chez les Messagers, on a appliqué la sélection à la longueur du bec, et la langue s’est allongée ; dans cette même race et d’autres ayant de grosses pattes, le nombre des scutelles des doigts

  1. Hist. des anomalies, t. III, p. 392. — Le professeur Huxley part du même principe pour expliquer les différences remarquables, quoique normales, dans l’arrangement du système nerveux des mollusques, dans son mémoire sur Morphology of Cephalous Mollusca, dans Philos. Trans., 1853, p. 56.
  2. Éléments de Tératologie végétale, 1841, p. 113.