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LOIS DE LA VARIATION.

ce qu’elles sont dans les mêmes animaux sauvages ou à demi-domestiqués, nous trouvons une différence énorme. Une bonne laitière peut, chez nous, donner environ 40 pintes (22lit,7) de lait, tandis qu’une vache de premier ordre, chez les Damaras de l’Afrique du Sud[1], par exemple, donne rarement plus de trois pintes (4lit,70) par jour, et refuserait absolument d’en donner si on lui enlevait son veau. Nous pouvons attribuer la grande valeur de nos vaches, sous ce rapport, soit à une sélection continue des meilleures laitières, soit aux effets héréditaires d’une augmentation dans l’activité des glandes lactifères, provoquée par l’art humain.

Il est évident, ainsi que nous l’avons vu au douzième chapitre, que la myopie est héréditaire, et la comparaison faite entre des graveurs ou des horlogers, par exemple, et des matelots, ne permet pas de douter que la vision constamment appliquée à des objets rapprochés, ne modifie et n’affecte d’une façon permanente la conformation de l’œil.

Les vétérinaires sont unanimes pour reconnaître que la ferrure et le parcours des routes dures, occasionnent chez les chevaux l’éparvin, les suros, etc., et que ces affections peuvent se transmettre. Autrefois les chevaux dans la Caroline du Nord n’étaient pas ferrés, et on assure qu’alors ils n’éprouvaient aucune de ces maladies des jambes et des pieds[2].


Autant que nous pouvons le savoir, tous nos quadrupèdes domestiques descendent d’espèces à oreilles droites, et cependant on ne pourrait en trouver que bien peu chez lesquels il n’y ait pas une race au moins ayant les oreilles pendantes. Les chats en Chine, les chevaux dans quelques parties de la Russie, les moutons en Italie et ailleurs, le cochon d’Inde en Allemagne, les chèvres et le bétail dans l’Inde, les lapins, les porcs et les chiens dans tous les pays depuis longtemps civilisés, ont les oreilles tombantes. Chez les animaux sauvages, qui se servent constamment de l’oreille comme d’un cornet acoustique pour saisir les moindres sons et surtout pour s’assurer de la direction d’où ils viennent, on ne rencontre, à l’exception de l’éléphant, aucune espèce ayant les oreilles pendantes. Cette incapacité à redresser l’oreille est donc certainement un résultat de la domestication, que quelques auteurs[3] ont attribué à un défaut d’usage, parce que les animaux vivant sous la protection de l’homme ne sont pas contraints à se servir habituellement de leurs oreilles. Le col.

  1. Andersson, Travels in South Africa, p. 318. — Pour des cas analogues dans l’Amérique du Sud, Aug. Saint-Hilaire, Voyage dans la province de Goyaz, t. I, p. 71.
  2. Brickell, Nat, Hist. of North Carolina, 1739, p. 53.
  3. Livingstone, cité par Youatt, On Sheep, p. 142. — Hodgson, Journ. of Asiat. Soc. of Bengal, vol. XVI, 1847, p. 1006, etc.