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LOIS DE LA VARIATION.

tivus paraissent d’abord être quelque chose de différent, car non-seulement d’anciennes conformations peuvent être reproduites, mais il s’en forme qui semblent nouvelles. Ainsi, après inflammation, il se développe des fausses membranes pourvues de vaisseaux, de lymphatiques et de nerfs, lorsqu’un ovule échappé des trompes de Fallope tombe dans l’abdomen, il se produit abondamment une lymphe plastique qui s’organise en une membrane richement pourvue de vaisseaux sanguins, et le fœtus est ainsi nourri pendant quelque temps. Dans certains cas d’hydrocéphale, les lacunes ouvertes dans le crâne sont occupées par de nouveaux os, qui se raccordent par des sutures parfaitement dentelées[1]. La plupart des physiologistes, surtout sur le continent, ont abandonné la croyance au blastème ou lymphe plastique, et Virchow[2] soutient que toute structure ancienne ou nouvelle est formée par la prolifération de cellules préexistantes. Dans cette manière de voir, les fausses membranes, ainsi que les tumeurs cancéreuses ou autres, sont simplement des développements anormaux de produits normaux, ce qui nous fait comprendre pourquoi ils ressemblent aux structures voisines ; par exemple, lorsqu’une fausse membrane revêt dans les cavités séreuses un épithélium exactement semblable à celui de la membrane séreuse originelle, ou lorsque des adhérences de l’iris deviennent noires apparemment par suite d’une formation de cellules pigmentaires analogues à celles de l’uvée[3].

Cette puissance de réparation, bien que quelquefois imparfaite, constitue une admirable disposition, prête à parer à diverses éventualités, même à celles qui ne se présentent que rarement[4]. Mais elle n’est pas plus étonnante que la croissance et le développement de chaque être, surtout de ceux qui se propagent par génération fissipare. J’ai mentionné ce sujet, parce que nous pouvons en inférer que lorsqu’une partie quelconque est, ou fortement augmentée de grosseur, ou tout à fait supprimée par la variation et la sélection continues, le pouvoir coordinateur de l’organisation doit constamment tendre à ramener peu à peu l’harmonie entre toutes les parties.


Effets de l’augmentation et de la diminution de l’usage sur les organes. — Il est incontestable que tout accroissement dans l’usage ou l’activité fortifie les muscles, les glandes, les organes des sens, etc., et que l’absence d’usage ou l’inactivité les affaiblit. Je n’ai pas rencontré dans les ouvrages de physiologie d’explication claire de ce fait. M. Herbert Spencer[5] admet que, lorsque les muscles travaillent beaucoup, ou que l’on exerce sur l’épiderme des pressions intermittentes, il

  1. Blumenbach, O. C., p. 52, 54.
  2. Pathologie cellulaire (trad. angl., 1860, p. 27, 441).
  3. Paget, O. C., vol. I, p. 357.
  4. Ibid., p. 150.
  5. Principes of Biology, 1866, v. II, chap. iiiv.