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SÉLECTION.

On dit qu’avant l’an 1600, l’empereur Akbar-Khan avait considérablement amélioré ses pigeons en croisant les races, ce qui implique nécessairement l’emploi d’une sélection attentive. À la même époque, les Hollandais s’adonnaient à l’élève du pigeon. Belon (1555) dit qu’en France on examinait la couleur des jeunes oies, afin d’obtenir des oies blanches et de meilleure sorte. En 1631, Markham conseille aux éleveurs de choisir toujours les lapins mâles de la plus belle apparence et les plus gros. Même pour les plantes de jardin, sir J. Hanmer écrivait, en 1600[1], que les meilleures graines étaient les plus pesantes, qu’on les trouve sur les tiges les plus vigoureuses, et recommande de ne laisser sur les plantes destinées à la graine qu’un petit nombre de fleurs, ce qui montre qu’on s’occupait déjà, il y a deux cents ans, de ces détails dans nos jardins. J’ajouterai comme exemple de la sélection ayant été appliquée dans des endroits où on pourrait le moins s’y attendre, qu’au milieu du siècle dernier, et dans une partie reculée de l’Amérique du Nord, M. Cooper avait amélioré par une sélection intelligente tous ses légumes, qui devinrent, par ce fait, très-supérieurs à ceux de ses voisins. Lorsque ses radis, par exemple, étaient propres à l’usage, il en prenait dix ou douze des meilleurs, et les plantait à cent mètres de distance d’autres qui fleurissaient en même temps ; il traita de la même manière toutes ses autres plantes, en variant les circonstances suivant leur nature[2].

Dans le grand ouvrage sur la Chine, publié au siècle dernier par les jésuites, et qui est une compilation d’anciennes encyclopédies chinoises, il est dit que l’amélioration des moutons consiste à choisir avec un soin tout particulier, les agneaux destinés à la reproduction, à les bien nourrir, et à tenir les troupeaux séparés. Les Chinois ont appliqué les mêmes principes à diverses plantes et arbres fruitiers[3]. Un édit impérial recommande le choix des graines remarquables par leur grosseur ; la sélection a même été appliquée par des mains impé-

    beaucoup de renseignements sur la sélection ancienne des moutons ; c’est là que j’ai trouvé rapporté le fait relatif à la défense d’abattre les jeunes béliers en Angleterre.

  1. Gardener’s Chronicle, 1843, p. 389.
  2. Communications to Board of Agriculture, cité dans Phytologia, de Dr Darwin, 1800, p. 451.
  3. Mémoire sur les Chinois, 1786, t. XI, p. 55 ; t. v, p. 507.