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DES QUATRE CHAPITRES PRÉCÉDENTS.

lorsqu’on tient les animaux en captivité, même dans leur pays natal, et bien que jouissant d’une grande liberté, leurs fonctions reproductrices sont souvent amoindries ou annulées. Quelques groupes peuvent être plus fortement affectés que d’autres, mais dans chacun on peut rencontrer de capricieuses exceptions. Quelques animaux ne s’accouplent que rarement ou jamais ; d’autres s’accouplent souvent, mais ne conçoivent jamais. Les caractères masculins secondaires, les instincts et affections maternelles, sont souvent affectés. On a observé des faits analogues sur les plantes soumises pour la première fois à la culture. Nous devons probablement nos fleurs doubles, nos fruits sans graines, nos tubercules quelquefois si volumineux, etc., à une stérilité naissante jointe à une nourriture abondante. Les animaux domestiqués ou les plantes cultivées depuis longtemps, peuvent ordinairement supporter de grands changements dans leurs conditions d’existence, sans que leur fécondité en soit altérée, bien que les uns et les autres puissent d’ailleurs être quelquefois légèrement affectés. Chez les animaux, c’est l’aptitude quelque peu rare de se reproduire librement en captivité qui, jointe à leur utilité, a pour ainsi dire dû déterminer les espèces qui ont été domestiquées.

Nous ne pouvons, dans aucun cas, dire d’une manière précise quelle peut être la cause de l’amoindrissement de la fécondité d’un animal qui vient d’être capturé, ou d’une plante qu’on soumet pour la première fois à la culture ; nous ne pouvons que conjecturer qu’il doit être attribué à quelque changement dans les conditions naturelles de leur existence. L’excessive susceptibilité dont le système reproducteur fait preuve à l’égard des moindres changements de ce genre, — susceptibilité qui ne se rencontre dans aucun autre organe — a probablement une influence importante sur la variabilité, comme nous le verrons dans un chapitre futur.

Il existe entre les deux classes de faits auxquels nous venons de faire allusion un double parallélisme frappant. D’une part, de légers changements dans les conditions extérieures, et les croisements opérés entre des formes ou variétés légèrement différentes, sont avantageux au point de vue de la fertilité et de la vigueur de la constitution. D’autre part, des changements plus considérables ou de nature différente dans les conditions