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HÉRÉDITÉ.

ainsi que la cécité nocturne, ou vision qui n’est possible que dans une forte lumière ; M. Cunier a rapporté un cas de ce dernier défaut, dont furent affectés vingt-cinq membres d’une même famille, dans l’espace de six générations. L’incapacité singulière de distinguer les couleurs, connue sous le nom de Daltonisme, est notoirement héréditaire, et a été suivie au travers de cinq générations, mais n’affectant que les personnes du sexe féminin.

Quant à la couleur de l’iris, on sait que l’absence de pigment coloré est héréditaire chez les albinos. On a constaté aussi l’hérédité de cas où l’iris d’un des yeux était différemment coloré que celui de l’autre ; ainsi que des iris tachetés. M. Sedgwick cite, d’après le Dr Osborne[1], le cas suivant, qui offre un curieux exemple d’une hérédité puissante. Dans une famille composée de seize garçons et cinq filles, tous avaient les yeux portant en miniature des marques semblables à celles d’un chat tricolore. La mère de cette nombreuse famille avait un frère et trois sœurs, tous ayant les yeux ainsi marqués, particularité qu’ils tenaient de leur mère, laquelle appartenait elle-même à une famille connue pour la transmettre à sa postérité.

Enfin, le Dr Lucas remarque qu’il n’y a pas une seule faculté de l’œil qui ne soit sujette à des anomalies toutes héréditaires. M. Bowman admet la vérité générale de cette proposition, qui cependant n’implique pas nécessairement l’hérédité de toutes les déformations, même dans des cas où les deux parents présenteraient une anomalie ordinairement transmissible.


L’hérédité des maladies et des difformités est extrêmement apparente chez le cheval, qui se multiplie plus vite que l’homme, et qu’on apparie avec soin, à cause de la valeur de ses produits. Aussi tous les vétérinaires sont-ils d’accord sur le fait de la transmission de presque toutes les tendances morbides, contraction des pieds, jardons, suros, éparvins, fourbure, faiblesse du devant, cornage, pousse, mélanose, ophthalmie, cécité (Huzard a été jusqu’à dire qu’il serait facile de former promptement une race aveugle), tiquage et caractère vicieux, et d’après Youatt, il n’y a presque pas une seule des maladies auxquelles les chevaux sont sujets, qui ne soit héréditaire[2]. Il en est de même du bétail, pour la phthisie,

  1. Dr Osborne, président du collège royal des médecins d’Irlande, a publié ce cas dans Dublin medical Journal, 1835.
  2. Les renseignements ci-dessus sont empruntés aux travaux suivants : — Youatt, The Horse, p. 35, 220. — Lawrence, The Horse, p. 30. — Karkeek, Gardener’s chronicle, 1853, p. 92. — Burke, Journal of R. Agric. Soc. of England, vol. v, p. 511. — Encyclop. of rural Sports, p. 279. — Girou de Buzareingues, Philosoph. Phys., p. 215. — Voir dans le Veterinary les travaux suivants : Roberts, vol. II, p. 144 ; — Marimpoey, vol. II, p. 387 ; — Karkeek, vol. IV, p. 5 ; — Youatt, sur le goitre chez les chiens, vol. v, p. 483 ; — Youatt, vol. VI, p. 66, 348, 412 ; — Bernard, vol. XI, p. 539 ; — Dr Samesreuther, sur le bétail, vol. XII, p. 181 ; — Percivall, vol. XIII, p. 47. — Pour la cécité chez le cheval, Dr P. Lucas,