Page:Darwin - De la variation des animaux et des plantes sous l'action de la domestication, tome 2, 1868.djvu/137

Cette page a été validée par deux contributeurs.
130
AVANTAGES DU CROISEMENT.

meilleure, sous le rapport de l’apparence extérieure, procréée dans ces sept générations, fut une truie qui constitua à elle seule la portée de la dernière ; appariée avec son père elle resta stérile, mais produisit immédiatement par un verrat de sang étranger. Il résulte de ce cas de M. Wright, qu’une série d’unions consanguines très-rapprochées, n’avaient pas affecté les formes extérieures, ni le mérite des jeunes, mais avaient exercé une action sérieuse sur leur constitution générale, leurs facultés mentales, et surtout sur les fonctions de la reproduction.

Nathusius[1] donne un cas analogue et encore plus frappant ; ayant importé d’Angleterre une truie pleine de la grande race du Yorkshire, il apparia successivement entre eux ses produits pendant trois générations ; le résultat fut défavorable ; les jeunes eurent une faible constitution, et leur fécondité fut diminuée. Une des dernières truies, qui était un bon animal, appariée avec son propre oncle (qui s’était montré fécond avec des truies d’autres races), fit une première portée de six, et ensuite une seconde de cinq petits très-faibles. Il livra ensuite cette truie à un verrat d’une petite race noire aussi importée d’Angleterre, lequel apparié avec des truies de sa race donnait de sept à neuf petits ; la truie de la grande race, si peu productive auparavant, produisit, par le petit porc noir, une première portée de vingt et un petits et une seconde de dix-huit ; soit un total de trente-neuf beaux produits dans une année.

Comme nous l’avons déjà vu pour d’autres animaux, et même lorsque la génération consanguine modérée ne produit pas d’effets fâcheux, ainsi que le dit un éleveur, M. Coate, « les croisements sont très-profitables au fermier pour obtenir une plus forte constitution et plus de rapidité de croissance ; mais pour moi, qui élève les porcs pour la reproduction, je ne puis en faire, parce qu’il faut des années pour revenir à la pureté de sang[2]. »


Relativement à l’homme, la question, sur laquelle je ne m’étendrai pas longuement, parce qu’elle est entourée de préjugés, a été discutée à divers points de vue par plusieurs auteurs[3]. M. Tylor[4], a montré que, dans les parties du monde les plus diverses, et chez les races les plus différentes, les mariages entre parents, — même éloignés — ont été rigoureusement interdits. On pourrait citer quelques cas exceptionnels, surtout dans les familles royales, qui ont été traités par

  1. O. C., p. 78.
  2. Sidney, On the Pig, p. 36, note p. 34. — Richardson, On the Pig, 1847, p. 26.
  3. Le Dr Dally a publié un excellent article (traduit dans Anthrop. review Mag., 1864, p. 65), où il critique tous les auteurs qui ont soutenu que les mariages consanguins entraînent de fâcheuses conséquences. Il est vrai que plusieurs avocats de ce côté de la question ont gâté leur cause par des inexactitudes ; ainsi Devay, Du Danger des Mariages, etc., 1862, p. 141, dit que le législateur de l’Ohio a prohibé les mariages entre cousins ; mais, après informations prises aux États-Unis, je me suis assuré que cette assertion est inexacte.
  4. Early History of Man, 1865, chap. x.