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COULEURS ET RAIES.

comme Azara parle de mules zain clair, je suppose que zain doit signifier isabelle. Dans quelques parties du globe, les chevaux redevenus sauvages ont une tendance prononcée vers le rouan[1]. Quand nous aborderons plus tard l’étude des pigeons, nous verrons que dans les races pures de couleurs variées, lorsqu’il se produit incidemment un oiseau bleu, cette coloration est invariablement accompagnée de certaines marques noires sur les ailes et la queue ; et que aussi lorsque l’on croise les races de colorations diverses, on obtient fréquemment dans les produits, des oiseaux bleus portant les mêmes marques noires. Nous verrons plus tard dans ces faits une forte preuve à l’appui, et l’explication de l’opinion que toutes les races du pigeon domestique descendent du Biset ou C. Livia, espèce qui présente effectivement la même coloration et les mêmes marques. L’apparition des bandes dans les différentes races de chevaux, dont le manteau appartient à une certaine teinte, ne prouve pas cependant d’une manière aussi certaine leur descendance d’une souche primitive unique que dans le cas du pigeon ; parce que nous ne connaissons aucun type de cheval réellement sauvage qui puisse servir de type de comparaison, que les bandes quand elles existent présentent des caractères variables, que nous n’avons pas de preuve évidente que l’apparition des bandes résulte du croisement de races distinctes ; parce qu’enfin toutes les espèces du genre Equus ont la bande dorsale, et que plusieurs ont les raies aux jambes et à l’épaule. Néanmoins, la similitude qu’offrent les races les plus différentes quant à la série des colorations, le pommelage, et l’apparition incidente des raies aux jambes et des bandes doubles ou triples à l’épaule, tous ces faits pris dans leur ensemble, rendent probable l’opinion que les races actuelles descendent d’une souche primitive unique, plus ou moins rayée, à manteau isabelle, et vers le type duquel nos chevaux tendent parfois à faire retour.

  1. Azara, Des Quadrupèdes du Paraguay, t. II, p. 307. — Pour la couleur des mules, p. 35). — Dans l’Amérique du Nord, Catlin (vol. II, p. 57) décrit les chevaux sauvages, qu’on croit descendus des chevaux espagnols du Mexique, comme offrant toutes les nuances, noirs, gris, rouans, et rouans tachetés d’alezan saure. — F. Michaux (Travels in North America) décrit deux chevaux sauvages du Mexique comme rouans. Dans les îles Falkland, où le cheval n’est redevenu sauvage que depuis 60 à 70 ans, les nuances prédominantes sont le rouan et le gris de fer. Ces faits montrent que les chevaux ne font pas généralement retour à une teinte uniforme.