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DE REPRODUCTION ET DE VARIATION.

panachées. Gallesio[1] a croisé ensemble des œillets blancs et rouges, les produits de la graine furent en général marbrés, mais on y voyait encore des fleurs toutes rouges ou toutes blanches. Quelques plantes n’ont donné une année que des fleurs rouges, l’année suivante des fleurs rayées, ou inversement, après n’avoir donné pendant deux ou trois ans que des fleurs rayées, certaines plantes sont revenues à la fleur rouge. J’ai fécondé le pois de senteur pourpre (Lathyrus odoratus) avec du pollen de la variété claire de la Dame Peinte, et les plantes obtenues du semis des grains d’une même gousse, au lieu d’être intermédiaires par leurs caractères, se trouvèrent ressembler aux parents. Plus tard dans la saison, les plantes qui avaient d’abord fourni des fleurs identiques à celles de la deuxième variété, donnèrent ensuite des fleurs rayées et tachetées de pourpre, marques qui dénotaient une tendance au retour vers la variété maternelle. A. Knight[2] a fécondé deux raisins blancs avec du pollen du raisin d’Alep, qui a le fruit et les feuilles panachés de teintes foncées. Les jeunes plantes qui en résultèrent ne furent pas d’abord panachées, mais elles le devinrent toutes l’été suivant ; de plus, plusieurs produisirent sur la même plante des grappes toutes noires ou toutes blanches, ou de couleur plombée striée de blanc, ou blanches marquées de petites raies noires, et on pouvait rencontrer sur la même grappe des raisins de toutes ces nuances.


Dans la plupart de ces cas de variétés croisées, et aussi dans quelques cas de croisements d’espèces, les couleurs propres à chacun des parents, ont apparu chez leurs produits de graine, dès leur première floraison, sous la forme de bandes, ou par le développement de fleurs ou fruits des deux sortes sur la même plante ; on ne peut, dans ce cas, attribuer l’apparition des deux couleurs à un effet de retour, mais plutôt à quelque obstacle s’opposant à leur mélange intime. Mais lorsque les fleurs ou fruits produits ultérieurement, soit dans la même saison, soit dans une génération suivante, deviennent rayés ou moitié d’une des couleurs et moitié de l’autre, etc., la séparation complète des deux couleurs qui se manifeste quelquefois, est alors un cas de retour par variation de bourgeons. Je montrerai, dans un chapitre futur, que chez des animaux provenant de croisements, on a vu des cas d’individus qui, pendant leur croissance, ont changé de caractères, et sont revenus vers ceux d’un des parents auxquels ils ne ressemblaient pas d’abord. Les faits que nous avons signalés ici montrent, à n’en pas douter, qu’une plante hybride, peut, par ses feuilles, ses

  1. Traité du Citrus, 1811, p. 48.
  2. Transact. Linn. Soc., vol. IX, p. 268.