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POMMES DE TERRE.

ainsi, dans les Gurken-Kartoffeln, ils forment une pyramide dont le sommet est en bas, et dans une autre variété ils s’enfouissent profondément dans le sol. Les racines elles-mêmes sont tantôt profondément enfoncées dans le sol, et tantôt à fleur de terre. Les tubercules varient par l’état plus ou moins lisse de leur surface, par la couleur, qui peut être extérieurement blanche, rouge, pourpre ou presque noire, et blanche, jaune ou presque noire en dedans. Ils diffèrent encore par leur goût, et peuvent être gras ou farineux ; par l’époque de leur maturation, et par leur aptitude à une conservation plus ou moins longue.

Comme dans beaucoup d’autres plantes qui ont longtemps été propagées par bulbes, tubercules, boutures, etc., circonstances par suite desquelles l’individu est exposé pendant une longue période à des conditions très-diverses, les plantes de pomme de terre levées de graine, présentent généralement d’innombrables différences. Plusieurs variétés, ainsi que nous le verrons dans le chapitre sur les variations de bourgeons, sont loin d’être constantes, même lorsqu’on les propage par les tubercules. Le Dr Anderson[1] ayant semé des graines d’une pomme de terre pourpre irlandaise, qui croissait isolée et loin de toute autre variété, de sorte que cette génération du moins ne pouvait avoir subi aucun croisement, obtint des plants tellement variés, qu’il n’y en avait presque pas deux de semblables. Quelques plantes très-analogues par leur partie extérieure, produisirent des tubercules dissemblables ; des tubercules, en apparence identiques, diffèrent entièrement par la qualité, une fois cuits. Même dans ces cas de variabilité considérable, la souche mère avait quelque influence sur sa progéniture, car la plupart des plantes ressemblaient à quelque degré à la pomme de terre irlandaise. On doit ranger parmi les races les plus cultivées et les plus artificielles, la Vitelotte (Kidney potato), dont les particularités se transmettent cependant rigoureusement par la graine. M. Rivers, une grande autorité[2] dans la matière, assure que les plantes levées de graine de la Vitelotte à feuilles de frêne, ressemblent toujours beaucoup à la souche dont elles proviennent. Les plantes provenant de la graine d’une variété de Vitelotte (Fluke Kidney), sont encore plus remarquables sous ce rapport, car en ayant pendant deux saisons observé un très-grand nombre, je n’ai pu constater aucune différence en précocité, productivité, grandeur ou forme de leurs tubercules.



  1. Bath Soc. Agric. Papers, vol. v, p. 127. — Recreations on Agricult., vol. v, p. 86.
  2. Gardener’s Chronicle, 1863, p. 643.