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CHIENS.

Chéops chassaient autrefois, et ressemblant un peu au chien courant écossais ; il a la queue fortement enroulée au-dessus du dos, et les oreilles détachées à angle droit. Un chien ressemblant au pariah a coexisté avec cette très-ancienne variété.

Nous voyons donc qu’il existait déjà, il y a quatre ou cinq mille ans, plusieurs races ressemblant de plus ou moins près à nos races actuelles, chiens pariahs, lévriers, courants, dogues, bichons et bassets. Il n’est cependant pas démontré qu’aucun de ces anciens chiens ait appartenu identiquement aux sous-variétés actuelles[1]. Tant qu’on a cru que l’existence de l’homme sur la terre ne datait que de six mille ans, ce fait de la diversité des races à une période aussi reculée, constituait un argument d’un certain poids en faveur de leur provenance de plusieurs souches sauvages, vu l’insuffisance du temps écoulé pour que la modification ait pu produire d’aussi fortes divergences. Mais maintenant que la découverte d’instruments de silex enfouis parmi les restes d’animaux éteints, dans des régions qui ont depuis éprouvé de grandes modifications géographiques, nous démontre que l’homme a existé depuis une époque incomparablement plus ancienne, et que nous voyons les nations les plus barbares avoir des chiens domestiques, l’argument de l’insuffisance du temps perd beaucoup de sa valeur.

Le chien était domestiqué en Europe bien longtemps avant l’époque historique. Dans les débris de cuisine de la période néolithique du Danemark sont enfouis des ossements d’un animal du genre chien, que Steenstrup prouve fort ingénieusement devoir être rapportés à un chien domestique, parce qu’une grande partie des os d’oiseaux conservés intacts dans ces amas de rebuts, sont précisément des os longs, que les chiens, ainsi qu’on l’a constaté par expérience, ne peuvent dévorer[2]. À ce chien a succédé en Danemark, pendant la période de bronze,

  1. Berjeau donne des fac-simile des dessins égyptiens. — M. C. L. Martin, dans son Histoire du Chien, 1845, a copié plusieurs figures des monuments égyptiens qu’il identifie avec des races canines actuelles. — MM. Nott et Gliddon (Types of Mankind, 1854, p. 388) donnent des figures plus nombreuses. M. Gliddon prétend qu’un lévrier à queue enroulée semblable à ceux figurés sur les plus anciens monuments, est commun à Bornéo ; mais le rajah, sir J. Brooke, m’assure qu’aucun chien pareil n’existe là-bas.
  2. Ces faits, ainsi que ceux qui suivent sur ces restes trouvés en Danemark, sont empruntés au mémoire intéressant publié par M. Morlot dans Soc. vaudoise des Sciences nat., t. VI, 1860, p. 281, 299, 320.