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PLANTES CULINAIRES : CHOUX.

et très-distincte du maïs d’Amérique. Enfin, à la sixième génération, ce maïs était identique à une variété européenne, que l’auteur décrit comme la seconde sous-variété de la cinquième race. Cette variété était encore, lorsque Metzger publia son livre, cultivée près de Heidelberg, où elle se distinguait de la forme commune, par une croissance plus vigoureuse. Des résultats analogues ont été obtenus par la culture d’une autre variété américaine, celle « à dents blanches, » chez laquelle la dent disparut déjà, dès la seconde génération. Une troisième race, dite « maïs de poulet, » ne se modifia que peu, et seulement par l’apparence de son grain, qui devint moins uni et transparent.


Les faits que nous venons de voir, nous fournissent l’exemple le plus remarquable que je connaisse, des effets prompts et directs du climat sur une plante. On pouvait bien s’attendre à ce que la taille de la plante, l’époque de sa végétation et de la maturation de sa graine, seraient en quelque sorte modifiées, mais les changements rapides et considérables qui se sont produits dans la graine sont surprenants. Toutefois, comme les fleurs, et leur produit qui est la graine, sont le résultat d’une métamorphose de la tige et des feuilles, toute modification dans ces derniers organes doit, par corrélation, tendre à affecter les organes de la fructification.


Chou. (Brassica oleracea). — Chacun sait combien les diverses sortes de choux varient par leur apparence. Sous l’action combinée d’une culture particulière et du climat, une tige a pu, dans l’île de Jersey, atteindre une hauteur de seize pieds, et supporter un nid qu’une pie avait construit sur son sommet. Les troncs ligneux hauts de dix à douze pieds ne sont pas rares, et sont employés comme chevrons et pour faire des cannes[1]. Ceci nous rappelle que, dans certains pays, les plantes appartenant à l’ordre généralement herbacé des Crucifères, peuvent se développer en arbres. Chacun peut apprécier la différence entre les grands choux à tête unique verts ou rouges ; les choux de Bruxelles avec leurs nombreux capitules ; les broccolis et les choux-fleurs, avec leurs nombreuses fleurettes avortées, incapables de produire de la graine, et réunies en un corymbe serré, au lieu de former une panicule ouverte ; les choux de Savoie avec leurs feuilles ridées et pustulées ; et les choux verts qui se rapprochent davantage de la forme primitive sauvage. Il y a encore des choux divers frisés et découpés ; d’autres offrant de magnifiques couleurs, dont Vilmorin, dans son catalogue de 1854, signale dix variétés, qu’on élève uniquement comme ornement, et qui se propagent par graines. Quelques sortes sont moins connues, telles que le « Couve Tronchuda » portugais, qui a les côtes des feuilles très-épaissies ;

  1. Bois de chou, Gardener’s Chronicle, 1856, p. 744, citation de Hooker, Journ. of Botany. Au musée de Kew, est exposée une canne faite d’une tige de chou.