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CÉRÉALES.

tions dans les formes, de la première apparition, de la rareté croissante, et enfin de l’extinction des espèces fossiles enfouies dans les couches successives d’une formation géologique.

Finalement, chacun doit juger par lui-même, s’il est plus probable que les différentes formes de froment, d’orge, de seigle et d’avoine, proviennent de dix ou quinze espèces, dont la plupart sont inconnues ou éteintes ; ou si elles sont descendues de quatre à huit espèces, qui peuvent, ou avoir ressemblé de près à nos formes actuellement cultivées, ou en avoir été trop différentes pour pouvoir leur être identifiées. Dans ce cas, nous devons conclure, que l’homme a dû cultiver les céréales dès une période infiniment ancienne, et qu’il n’est pas improbable que dans cette culture, il ait dû pratiquer une certaine sélection. Nous pouvons aussi admettre que, sous l’influence des premières cultures, les grains et les épis auront promptement grossi, de la même manière qu’on voit les racines de la carotte sauvage augmenter rapidement de volume, lorsqu’on les soumet à la culture.


Maïs. (Zea mais). — Les botanistes sont à peu près unanimes pour admettre que toutes les formes cultivées de cette plante appartiennent à la même espèce. Le maïs est incontestablement d’origine américaine[1], et était cultivé par les indigènes, dans tout le nouveau continent depuis la Nouvelle-Angleterre jusqu’au Chili. Sa culture doit remonter à une époque fort ancienne, car Tschudi[2] en décrit deux espèces, actuellement inconnues au Pérou ou éteintes, et qu’on a trouvées dans des tombeaux antérieurs à la dynastie des Incas. Comme preuve encore plus convaincante de l’antiquité du maïs, je citerai le fait que, sur les côtes du Pérou[3], j’ai déterré des têtes de maïs, accompagnant dix-huit espèces de coquilles de mollusques récents, enfouis dans le sable d’une plage qui avait été soulevée à quatre-vingt-cinq pieds au-dessus du niveau de la mer. Comme conséquence de cette ancienne culture, le maïs a donné naissance à un grand nombre de variétés américaines, mais on n’a pas encore découvert à l’état sauvage, la forme primitive. On a prétendu, mais sur des données insuffisantes, qu’une sorte particulière[4], dans laquelle les grains, au lieu d’être

  1. Alph. de Candolle, O. C., p. 942. — Pour la Nouvelle-Angleterre, voir Silliman’s American Journal, vol. XLIV, p. 99.
  2. Travels in Peru., p. 177.
  3. Geolog. Observ. on S. America, 1846, p. 49.
  4. Ce maïs est figuré dans le magnifique ouvrage de Bonafous, Hist. nat. du maïs, 1836, pl. v bis ; et dans Journ. of Hort. Soc., 1846, vol. I, p. 115, se trouve une description du résultat obtenu en semant sa graine. Un jeune Indien guaranien en voyant ce maïs, dit à Auguste Saint-Hilaire, qu’il croissait sauvage dans les forêts humides de sa patrie. (De Can-