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OIES DOMESTIQUES.

et habitant des îles Océaniques, ont des ailes considérablement réduites et sont dans l’impossibilité de voler. Dans mon Origine des Espèces, j’avais émis l’idée que, ces oiseaux n’ayant pas d’ennemis à redouter, leurs ailes s’étaient graduellement réduites par défaut d’usage. On pouvait par conséquent s’attendre à ce que, pendant les premières périodes de ce commencement de diminution, les oiseaux dans ce cas ressemblassent à nos canards domestiques, par l’état de leurs organes du vol. C’est précisément ce qui est pour la poule d’eau de Tristan d’Acunha (Gallinula nesiotis) qui peut voltiger un peu, mais, pour se sauver, se sert surtout de ses jambes et non de ses ailes. M. Sclater[1] ayant examiné cet oiseau, a trouvé que ses ailes, son sternum, ses os coracoïdiens, sont réduits en longueur, et la crête sternale en profondeur, si on les compare aux mêmes os de la poule d’eau européenne (G. chloropus) ; d’autre part, le fémur et le bassin, comparés à ceux de la poule d’eau ordinaire sont plus grands, le premier de quatre lignes. Il s’est donc opéré, à un degré un peu plus prononcé, sur le squelette de cette espèce naturelle, les mêmes changements que sur nos canards domestiques ; je crois que personne ne pourra contester que, dans le cas en question, ils ne soient dus à une diminution de l’usage des ailes et à une augmentation de celui des jambes.

OIES.

De tous les animaux dont la domestication est ancienne, il n’en est presque pas qui aient aussi peu varié que l’oie. L’antiquité de la domestication de cet oiseau nous est révélée par quelques vers d’Homère, et par les oies conservées au Capitole de Rome (388 ans avant Jésus-Christ), et dont la consécration à Junon impliquait une haute antiquité[2]. Le désaccord qui règne entre les naturalistes, relativement à l’espèce sauvage dont elle peut descendre, montre que l’oie a varié dans certaines limites ; il est vrai, que dans ce cas, la difficulté provient surtout de l’existence de trois ou quatre espèces sauvages européennes, très-voisines les unes des autres[3]. La plupart des observateurs

  1. Proc. zool. Society, 1861, p. 261.
  2. Sir J. E. Tennent, Ceylon, 1859, vol. I, p. 485 — J. Crawfurd, O. C., 1860. — Rev. E. S. Dixon, Ornament. Poultry, 1848, p. 132. — L’oie figurée sur les monuments égyptiens paraît avoir été l’oie rouge d’Égypte.
  3. Macgillivray, British birds, vol. IV, p, 593.