Page:Darwin - De la variation des animaux et des plantes sous l'action de la domestication, tome 1, 1868.pdf/261

Cette page a été validée par deux contributeurs.
245
LEUR ORIGINE.

On voit par ce résumé que les diverses races varient beaucoup, et qu’elles pourraient avoir pour nous autant d’intérêt que celles des pigeons, si nous avions des preuves aussi évidentes de leur descendance d’une espèce primitive unique. La plupart des éleveurs croient à leur provenance de plusieurs souches originelles, opinion que soutient énergiquement le Rév. E. S. Dixon[1]. À l’exception d’un petit nombre, entre autres Temminck, les naturalistes admettent la provenance de toutes les races, d’une espèce unique ; mais en pareille matière, l’autorité d’un nom n’a que peu de poids. Dans leur ignorance des lois de la distribution géographique, les éleveurs cherchent dans toutes les parties du globe les origines possibles de leurs souches inconnues. Ils savent bien que les différentes formes reproduisent exactement leur type, même pour la couleur, et attribuent, mais, comme nous le verrons, sur des bases insuffisantes, à la plupart des races une grande ancienneté. Frappés des différences remarquables qui existent entre les principales formes, ils se demandent si des diversités de climat, de nourriture ou de traitement, ont pu produire des oiseaux aussi dissemblables que le majestueux coq Espagnol noir, le petit et élégant Bantam, le pesant Cochinchinois avec ses particularités, et le coq Huppé avec son immense touffe et son crâne saillant. Mais, tout en reconnaissant et même exagérant les effets des croisements des diverses races, les éleveurs ne tiennent pas assez compte de la probabilité, pendant le cours de plusieurs siècles, de l’apparition occasionnelle d’oiseaux présentant des particularités anomales et héréditaires ; ils méconnaissent les effets de la corrélation de croissance, ceux de l’usage continuel ou du défaut d’usage des organes, et les résultats directs des changements de climat et de nourriture, point qui n’est cependant pas encore démontré d’une manière suffisante. Enfin, autant que je le sache, tous méconnaissent entièrement le fait capital de la sélection inconsciente, non méthodique, quoique sachant fort bien que leurs oiseaux sont individuellement différents, et qu’ils peuvent améliorer leurs produits, en choisissant même pendant un petit

  1. Ornamental and dom. Poultry, 1848.