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MODE DE FORMATION DES PRINCIPALES RACES.

gènes, sont par ce fait contraints à se percher par bandes sur les arbres. Si donc nos races domestiques se fussent trouvées fortement modifiées sur les divers points précités, points dont les éleveurs ne se sont jamais préoccupés, et qui ne paraissent être en aucune corrélation avec d’autres caractères recherchés par eux, le fait de leur modification, d’après les principes soutenus dans ce chapitre, eût été fort embarrassant à expliquer.


Résumons rapidement les deux chapitres que nous venons de consacrer au Pigeon. Nous pouvons, en toute sécurité, conclure que les races domestiques, malgré les différences qui existent entre elles, descendent toutes de la Colomba livia, en comprenant sous cette dénomination quelques races sauvages. Les différences que présentent ces dernières, ne jettent toutefois aucun jour sur les caractères qui distinguent les races domestiques. Dans chaque race ou sous-race, les individus sont plus variables qu’ils ne le sont à l’état de nature, et parfois ils varient fortement et subitement. Cette plasticité de l’organisation résulte apparemment du changement des conditions extérieures. Le défaut d’usage réduit certaines parties du corps. La corrélation de croissance relie si intimement entre elles toutes les parties de l’organisation, que toute variation de l’une d’elles entraîne une variation correspondante dans une autre. Lorsque plusieurs races ont été formées, leurs croisements réciproques ont facilité la marche des modifications, et ont souvent causé l’apparition de nouvelles sous-races. Mais, de même que dans la construction d’un bâtiment, les pierres et les briques seules, sont de peu d’utilité sans l’art du constructeur, de même dans la création de nouvelles races, l’action dirigeante et efficace a été celle de la sélection. Les éleveurs peuvent agir par sélection, aussi bien sur de minimes différences individuelles, que sur des différences plus importantes. L’éleveur emploie la sélection méthodiquement, quand il cherche à améliorer ou à modifier une race, pour l’amener à un type de perfection préconçu et déterminé ; ou bien, il agit sans méthode et d’une manière inconsciente, lorsqu’il n’a d’autre but que d’élever les meilleurs oiseaux possibles, sans aucune