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PIGEONS DOMESTIQUES.

Nous voyons par ces détails historiques que presque toutes les races domestiques principales existaient avant l’an 1600. Quelques-unes, remarquables par la couleur, paraissent avoir été identiques à nos races actuelles, quelques-unes presque semblables ; d’autres étaient fort différentes, enfin un certain nombre se sont éteintes. Quelques races, telles que les Finnikins, les Tournants, le Pigeon à queue d’hirondelle de Bechstein, et le Carmélite, semblent avoir pris naissance et disparu dans cette période. Quiconque visiterait aujourd’hui une volière anglaise bien assortie, désignerait certainement comme types distincts, le Runt massif ; le Messager avec son bec allongé et ses gros caroncules ; le Barbe avec son bec élargi, court, et son large cercle de peau nue autour des yeux ; le Culbutant courte-face avec son petit bec conique ; le Grosse-gorge avec son jabot dilaté, son corps et ses membres allongés ; le Pigeon Paon avec sa queue redressée, largement étalée et bien fournie en plumes ; le Turbit avec sa fraise et son bec court et mousse ; et le Jacobin avec son capuchon. Qui eût pu passer en revue les Pigeons élevés avant 1600 par Akber-Khan dans l’Inde, et par Aldrovande en Europe, eût probablement vu le Jacobin avec un capuchon moins parfait, le Turbit sans fraise, le Grosse-gorge à jambes plus courtes, et sous tous les rapports moins remarquable, — si toutefois le Grosse-gorge d’Aldrovande ressemblait à l’ancienne race allemande ; — le Paon moins singulier dans son apparence, et ayant une queue moins fournie ; il eût vu d’excellents Culbutants aériens, mais aurait en vain cherché des formes à courte-face ; il eût vu des oiseaux voisins, mais différents de nos Barbes actuels ; et enfin il eût rencontré des Messagers dont le bec et les caroncules devaient être incomparablement moins développés qu’ils ne le sont maintenant chez les Messagers anglais. Il eût pu classer la plupart des races dans les mêmes groupes, mais les différences entre les groupes devaient alors être bien moins prononcées qu’elles ne le sont aujourd’hui. Bref, les diverses races n’avaient pas à ce moment-là divergé à un si haut degré de leur ancêtre commun, le Bizet sauvage.