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RETOUR PAR LA COULEUR.

cette tendance au retour, mais nous aurons occasion, par la suite, de donner de ce fait des preuves nombreuses et évidentes. Il est probable que j’eusse pu, pendant un siècle, produire des Barbes noirs purs, des Pigeons Heurtés, Coquilles, Paons blancs, Tambours, etc., sans obtenir un seul oiseau bleu ou barré ; et en croisant ces races j’ai, dès la première et seconde génération dans le cours de trois ou quatre ans au plus, obtenu un grand nombre de jeunes oiseaux plus ou moins colorés en bleu, et portant pour la plupart les marques caractéristiques qui accompagnent ce plumage. Lorsqu’on croise des oiseaux blancs et noirs, ou noirs et rouges, il semble que les deux parents aient une tendance à produire des rejetons bleus, et que cette tendance ainsi combinée, l’emporte sur la tendance séparée qu’a chacun des parents à transmettre sa propre coloration noire, blanche ou rouge.

Si nous rejetons l’opinion que toutes les races de Pigeons soient la descendance modifiée de la C. livia, pour admettre qu’elles proviennent d’autant de souches primitives, nous avons à choisir entre trois hypothèses. Premièrement, qu’il a autrefois existé huit ou neuf espèces primitives ayant diverses colorations, mais qui ont ultérieurement varié si exactement de la même manière qu’elles sont toutes arrivées à acquérir celle de la C. livia ; cette hypothèse n’explique nullement l’apparition de ces colorations et des marques qui les accompagnent dans les produits obtenus par le croisement de ces races. Secondement, on pourrait supposer que les espèces primitives ont toutes eu la coloration bleue, ainsi que les marques caractéristiques du Bizet, mais cette supposition est improbable au dernier point, puisque, cette espèce exceptée, on ne trouve ces caractères réunis sur aucun membre existant du grand groupe des Colombides, et qu’il serait impossible de trouver aucun autre cas d’espèces identiques par le plumage, et cependant sur plusieurs points de leur conformation aussi différentes que le sont les Grosses-gorges, les Messagers, les Culbutants, etc. Troisièmement enfin, nous pourrions supposer que toutes les races, qu’elles descendent de la C. livia ou de plusieurs espèces primitives, bien qu’ayant été élevées avec les plus grands soins et si hautement prisées par les éleveurs, auraient toutes, dans le cours d’une douzaine ou au plus d’une vingtaine de géné-